Un main bien manucurée posée à plat sur un sac Chanel dont on peut admirer le détail couture, voir même en sentir le cuir tant que l’image « sous verre » consultée sur l’écran tactile est palpable. Au majeur et à l’annulaire, deux magnifiques bagues de la collection joaillière maison, Cococrush. Le fermoir du sac en forme de double C signe l’image d’un logo, sans donner l’impression d’y voir là une publicité, sinon un instant précieux. Oui, nous sommes bien dans les traditionnels codes du luxe papier glacé mais il y a dans le visuel un « je ne sais quoi » qui tend à penser que la photographie n’a pas été retouchée sous Photoshop, ni même subit la moindre transformation dû à un des nombreux filtres que propose l’application. La lumière est très belle, paraît naturelle, sans artifices. Le set est soigné mais semble pris dans le quotidien ordinaire d’une femme extraordinaire. Une femme Chanel, dont la légende évoque une pensée secrète et intime, pulsionnelle : I need it. I need it. I need it. I need it. I need it. Suivi du hashtag #CocoObsession et du crédit photo : Caroline de Maigret, mannequin français à la carrière internationale, qui a également crée son label de musique.

Autrement dit, une ambassadrice élue ou lapin blanc de circonstance, à qui l’on a confié provisoirement les clés du compte Instagram maison. Neuf cases, neuf moments dans la vie de cette femme initiée à la marque, mais évoluant dans son environnement : entre intimité et exhibition, on ne sait plus très bien si c’est la mannequin qui pose où l’héroïne de l’histoire qui hésite dans l’essayage de ces nouvelles parures : or ou argent ? Une seule bague, ou plusieurs à la même main ? Différents éclairages sur la collection, différentes ambiances de lumières pour ponctuer avec des ellipses temporelles ce storytelling visuel proposé par la marque. L’objectif ici n’est pas transactuel, car Instagram n’est pas une plateforme e-commerce.

Le but de l’opération est de mettre en avant la collection #cococrush et de créer de la désirabilité auprès d’une nouvelle génération de clientes, mobiles et connectées. En tapotant 2 fois sur leurs écrans tactiles, elles « like » l’image consultée de façon compulsive, geste gratuit qui n’engage à rien, sinon le plaisir de montrer à la marque qu’on existe, d’une certaine façon sortir de l’anonymat.

Le fin mot de l’histoire, c’est que la photographie prise par le mannequin Caroline de Maigret commentée plus haut comptabilise 124 000 Likes, ce qui énorme en terme d’engagement qui plus est organique, sans aucune dépense en achat media. Quand on pense que certains magazines mode de niche se tirent à environ 100.000 exemplaires et qu’une simple page coûte une quinzaine de milliers d’euros, la comparaison n’est pas inintéressante. Autre fait marquant, la vidéo YouTube de la gamme CocoCrush très bien exécutée n’enregistre elle qu’un petit 37 000 vues, soit moitié moins que la moyenne de Likes observée sur le compte Instagram de Chanel, environ 70K. De plus, on ne parle pas d’impressions ou nombres de personnes qui ont été exposés à l’image comptée comme « vue » comme c’est le cas concernant la presse, on parle de like, c’est à dire concrètement d’un « clic » qui manifeste l’engagement de l’abonné pour le contenu consulté.